Randonnées malouines : sous l'orage, autour de Saint-Malo (1/4)
Randonnées malouines : sous l'orage, autour de Saint-Malo (1/4)
Mercredi 12 août 2020
Les photos non signées Pascal J - Yanike Kayak sont de Jean Drouglazet.
A l'initiative de mon frère Roland, adhérent au club des Corsaires Malouins, Jean et moi sommes invités pour partager des randonnées en kayak dans le secteur de Saint-Malo.
L'appartement de Roland nous sert de "camp de base".
Initialement nous avions prévu une rando sur 2 jours (mercredi et jeudi), avec bivouac, sur un parcours Rochebonne, Ile de Cézembre, pointe du Décollé, pointe de Saint Cast, et retour à Rochebonne par la côte.
Les prévisions météo annonçant une alerte orage vont nous faire revoir nos plans.
Les orages étant annoncés mercredi après-midi, nous décidons mardi soir de maintenir une rando sur la journée, avec un passage à Cézembre la matin.
Christian nous rejoint à l'appartement, nous préparons notre matériel pour la journée.
Nous sanglons nos kayaks sur des chariots, afin de rejoindre la plage de Rochebonne, où nous retrouvons Jean-Pierre, Patrice et Jean-Philippe.
La marée haute est à 13h01, coefficient 38.
Pendant que nous nous préparons, le ciel s'obscurcit nettement côté terre, l'orage arrive plus tôt que prévu.
Nous embarquons à 9h55, et la pluie s'invite à notre départ.
Devant ce brusque changement de temps, nous renonçons à la traversée vers Cézembre et décidons de faire un parcours côtier, plus sécurisé, vers Saint-Malo.
A la VHF, j'entends les messages des clubs de voile et de surf qui font rentrer leur stagiaires à terre.
Nous longeons la grande plage du Sillon ....
... jusqu'au Fort National.
Nous sommes juste devant l'orage, qui poursuit sa route vers l'île de Cézembre.
Nous laissons le Fort National à bâbord et nous approchons de la côte.
Devant nous, les bâtiments de l'école nationale supérieure maritime et la tour Bidouane.
L'orage se rapproche. Le ciel au-dessus du Grand-Bé, ou repose Chateaubriand, se noircit.
Nous entendons le tonnerre et voyons quelques éclairs.
Au loin, le Fort du Petit-Bé, construit au XVIIe siècle et conçu par Vauban, il fait partie de la ligne de défense de Saint-Malo....
Devant la plage du Bon Secours, une piscine d'eau de mer avec plongeoir ...
L'orage nous rattrape ...
Nous passons devant le phare Môle des Noires ...
Cette jetée sert à l'accostage des bateaux mais joue aussi le rôle de brise-lames. Le Môle vise à protéger la cité contre les vagues. Il fut construit entre 1837 et 1842, depuis le bastion Saint-Philippe et a donné son nom à la plage. S’il s’étend aujourd’hui sur 520 mètres, le Môle a été rallongé dans les années 1930.
Son nom, le Môle des Noires, vient du fait qu’il prend appui sur les roches des Noires.
Nous traversons le chenal, laissant à bâbord le port des Sablons ...
En face de nous, les blockhaus de la Cité d'Alet.
Nous contournons la cité d'Alet, et passons près d'une énigmatique tourelle.
Il s'agit d’un marégraphe, un dispositif permettant de calculer le niveau de la mer sur le long terme.
Endommagé lors de la libération de Saint-Malo en août 1944, le marégraphe de Saint-Servan est rénové en 1970 et est aujourd’hui utilisé par l’usine marémotrice de la Rance.
Nous apercevons la rampe et l'abri du canot de sauvetage.
L'imposante Tour Solidor.
Elle fut construite en 1382 dans le but de contrôler la ville de Saint-Malo. Elle est composée de trois étages et comporte trois tours rondes de 18 mètres de hauteur et un escalier de 104 marches.
Les militaires l’ont occupée pendant longtemps afin de guetter l’estuaire dans le but de bloquer le commerce entre Saint-Malo et Dinan. Par la suite, ses étages ont été utilisés comme prison sous la Révolution puis d’entrepôt sous l’Empire.
Une croix réside au pied de la tour. Elle fut érigée en 1985 sur le rocher où Jacques Cartier largua les amarres pour le Canada en 1534.
Nous débarquons vers 11h00, sous une pluie battante, sur la plage Saint-Père.
Nous remontons nos kayaks sur la cale ...
Pour cette première partie de randonnée côtière, nous avons parcouru 3,3 milles nautiques.
Il est plus prudent d'être à terre qu'en mer.
Nous allons laisser passer l'orage.
Jean-Pierre nous propose de nous faire découvrir la cité d'Alet.
Sa connaissance de l'histoire, son érudition, nous permettent d'apprécier cette balade terrestre en compagnie d'un guide de grande qualité.
Merci Jean-Pierre, pour ce partage.
La presqu’île de la Cité d’Alet a été l’emplacement choisi par les premiers habitants de Saint-Malo avant de transférer, au XIIè siècle, le coeur de l’agglomération dans la ville intra-muros que l’on connait aujourd’hui.
Nous commençons notre visite par la cathédrale Saint Pierre d'Alet.
C'est le plus ancien lieu de culte chrétien dans la région, dont on découvre les ruines de l'abside de l'édifice pré-roman du 10ème siècle.
Le site a révélé également les restes d'un édifice gallo-romain du 4ème siècle.
Des fouilles archéologiques ont démontré une occupation des lieux dès le néolithique. Ensuite, ce sont les Coriosolites, l’une des tribus celtes occupant l’Armorique qui firent d’Alet leur capitale.
Le site est verdoyant et vallonné. Il offre un superbe panorama sur Saint-Malo et la côte.
Un peu bouché aujourd'hui à cause du mauvais temps.
Nous apercevons le Renard, cotre Corsaire de 30 mètres.
Ce voilier de légende est une réplique du dernier navire armé en 1812 par le célèbre corsaire malouin Robert Surcouf (1773 /1827).
Nous arrivons devant un blockhaus allemand marqué par les intenses combats survenus à Saint-Malo lors de la Libération.
Pendant l’Occupation, les Allemands fortifient l’ancienne cité, truffant le sous-sol d’un réseau de galeries relié aux différents bunkers et tourelles, disposés tout autour de la presqu’île. Le fort devient le centre de ce que les Allemands appelaient alors la « Festung Saint-Malo », autrement-dit, la forteresse de Saint-Malo.
Les tourelles métalliques des postes de tir des blockhaus portent encore les stigmates causés par les bombardements de 1944.
Nous passons devant le fort, construit en 1759 puis modernisé par l’organisation Todt en 1942, elle comprend dans sa cour intérieure un blockhaus aménagé en musée (Mémorial 39/45, exposition permanente sur la Seconde Guerre mondiale dans la région malouine).
Même avec ce mauvais temps, les panoramas sur le Grand-Bé, Saint-Malo intra-muros et le port des Sablons sont magnifiques.
Nous terminons la visite par l'ultime vestige d’un rempart datant du IIIème siècle.
Malgré un rempart haut de 3 à 4 mètres, Alet subit des pillages des Francs, des Saxons ou des Normands. Ces raids répétitifs pousseront de plus en plus d’habitants à se réfugier sur le rocher de Saint-Malo, qui se trouve maintenant en face de nous.
L’îlot qui n’abritait alors qu’une petite communauté monastique va progressivement supplanter la cité d’Alet.
Nous revenons à nos kayaks, et nous embarquons.
Depuis toujours, la Rance a séparé les rives de Dinard et de Saint-Malo.
Jean-Pierre évoque des traces de chars romains encore visibles dans les rochers de chaque côté de la rivière, Nous contournons la Tour Solidor pour tenter de les voir.
Nous traversons l'embouchure de la Rance, en direction de la pointe du Moulinet à Dinard.
Nous admirons les belles villas qui surplombent la mer.
Jean-Pierre connaît de nombreuses anecdotes sur ces belles demeures.
La villa La Garde (1ère photo ci-dessous) est construite par la famille Hennessy, négociants en Cognac d'origine irlandaise.
Cette villa de grande dimension et d'architecture néogothique anglaise rappelle les anciens châteaux médiévaux de type Tudor.
Nous contournons la pointe du Moulinet, et observons la piscine de l’Ecluse et le pont de l’Emeraude qui permet d’accéder aux villas de la pointe.
Dinard, en 1928 est la première station balnéaire de la côte à se doter d’une piscine d’eau de mer en plein air.
Sur la côte les marées peuvent être importantes, aussi ce bassin garantissait aux vacanciers un accès permanent à l’eau de mer.
En arrière-plan, la porte d’Emeraude a été creusé dans les années 1910 afin de relier la plage de l’Ecluse à la cale située de l’autre côté de l’isthme. L’ouvrage a été modifié depuis pour permettre le passage des voitures.
Nous débarquons plage de l'Ecluse ...
... et pique-niquons sur la promenade au-dessus de la plage.
Nous avons parcouru 1,4 mille nautique depuis la Tour Solidor.
Nous reprenons la mer et poursuivons notre balade côtière vers l'Ouest.
A la pointe de la Malouine, nous passons devant une villa emblématique : les Roches Brunes.
Elle a été construite entre 1893 et 1896 par le promoteur Auguste Poussineau pour son frère, le couturier parisien Émile Poussineau, dit “ Félix “.
Aujourd'hui possession de la ville de Dinard, des expositions y sont organisées.
La Villa “ Les Roches Brunes “ a été inscrite au titre des Monuments Historiques le 24 juin 2014.
Les villas de la pointe de la Malouine sont construites dans un style relativement homogène, symbole de cohésion sociale.
On vient à Dinard pour voir et être vu.... Bow-windows, terrasses, lucarnes à pans coupés sont autant d'extravagances de ce qui marque l'architecture balnéaire de cette époque.
La couleur prend aussi une place importante : briques vernissées et carreaux de ciment sont apposés sur les murs extérieurs pour en souligner les détails.
La villa Greystones a été construite à partir de 1938 par et pour l’architecte Michel Roux-Spitz (1888-1957). Ce vaisseau de granite et de béton surplombant la mer, couvert d’une toiture-terrasse et prolongée d’une rotonde en porte à faux, semble taillée pour affronter les éléments, à l’image des ouvrages militaires construits face à elle.
François Pinault a racheté cette villa en 2012.
Nous longeons la plage de Saint-Enogat et nous faisons une halte devant une grotte, à la pointe de la Roche Pelée.
Nous mettons le cap sur la balise du Grand Genillet...
... et arrivons à la pointe du Décollé.
on y aperçoit les ruines d'une ancienne tour de guet.
Nous faisons demi-tour et revenons vers Saint-Malo par la côte.
Nous revoyons les villas, les plages, le Petit-Bé, les remparts,
Petite pause devant les remparts ...
Jean-Pierre va nous quitter pour prendre le chemin le plus direct pour rentrer chez lui.
Nous longeons la plage du Sillon.
Vers 17h30, débarquement cale de la Hoguette pour Roland, Christian, Jean et moi ...
Patrice et Jean-Philippe débarquent cale de Rochebonne.
Voilà donc cette première journée achevée.
Nous avons parcouru 7,8 milles nautiques depuis la plage de l'Ecluse à Dinard.
Sur la journée, nous avons navigué 12,5 milles nautiques.
Ce n'est pas le scénario que nous avions prévu.
Quand l'orage est annoncé, les prévisions sont complexes.
Les modèles météo consultés affichaient des informations divergentes sur l'heure d'arrivée des orages, sur la force du vent, sur la pluviométrie, etc ...
L'orage est arrivé bien plus tôt que prévu.
Il est passé, et finalement, nous nous attendions à pire.
Nous avons pu randonner en sécurité, à proximité de la côte.
Nous avons vu et appris beaucoup sur le riche passé de la région; merci à Jean-Pierre pour ses commentaires, et à nos amis malouins pour leur accueil bien sympathique.
Il nous reste 3 jours de navigation, ce soir, autour de l'apéro, nous allons décider ensemble du programme à venir.
A suivre ....
Vive le kayak !