Rivière de Pont-l'Abbé : dans les entrailles du pont habité
Rivière de Pont-l'Abbé
Samedi 2 mars 2019
Les photos non signées Pascal J - Yanike Kayak sont de Jean Drouglazet.
Aujourd'hui vent de sud-ouest force 5 annoncé, et forte houle.
La région d'Audierne n'est pas très propice au kayak.
Au club de Plouhinec, c'est séance cartes marines et préparation de navigations.
Pour ceux qui veulent malgré tout pagayer, je propose une sortie sur la rivière de Pont-l'Abbé.
Avec Jean, Guenaelle et Paul, nous nous retrouvons en début d'après-midi à l'Ile Tudy, sur la côte ouest de la presqu'île.
Nous y rencontrons Yann Kermoal, qui vient essayer l'une de ses planches à foils.
Nous embarquons vers 14h30, pour une balade d'environ 8 milles nautiques.
Le vent forcissant balaie l'embouchure de la rivière, nous mettons le cap sur l'île Garo, puis nous passons au sud de l'île Queffen.
A tribord, l'île Chevalier laisse apparaître une belle bâtisse.
Nous distinguons aussi l'île aux Rats
Nous naviguons jusqu'à la digue qui mène à l'île Queffen....
... où nous distinguons deux bâtiments ...
... puis nous effectuons un portage pour traverser la digue.
Nous ré-embarquons et traversons une zone de schorres ( “schorre” a été emprunté au néerlandais « schor » qui désigne un « terrain d'alluvions »).
Les schorres sont des étendues naturelles planes à végétation basse situées à proximité du bord de mer qui sont inondées par les eaux salées uniquement lors des marées.
Devant nous, quatre spatules blanches.
En remontant la rivière, nous apercevons à bâbord un menhir dans l'eau.
C'est le menhir de Penglaouic. (Pen = tête, glaou = charbon)
Ce mégalithe date d'environ 5000 ans, il fut érigé sur la terre ferme à 2,5km de la côte avant la remontée du niveau de la mer. Il indiquait la source d'un petit ruisseau affluent de la rivière de Pont-l'Abbé.
Il sépare les communes de Pont-l'Abbé et de Loctudy.
Nous poursuivons notre agréable balade sur la rivière
Les habitations se font plus nombreuses, nous arrivons à Pont-l'Abbé.
Un ancien moulin à marée a été rénové en maison d'habitation.
Un passage mène à un étang barré par une digue.
Nous nous y engageons.
Après avoir écarté les chaînes qui nous ouvrent l'accès à l'étang, nous avons une autre vue de l'ancien moulin.
Nous nous ré-engageons à nouveau dans l'étroit passage pour rejoindre la rivière.
Sur l'autre berge, nous avons l'agréable surprise de rencontrer Pascal B.
Nous repartons vers le chantier naval de Pors Moro, qui nous indique que nous entrons dans le port de Pont-l'Abbé, qui était un haut lieu de commerce aux 18ème et 19ème siècles.
Nous voici maintenant dans le port de Pont-l'Abbé.
Sur notre gauche, nous apercevons le clocher de l'église Notre Dame des Carmes.
Cette église est aujourd'hui connue pour sa remarquable rosace du 15ème siècle, véritable dentelle de pierre.
Elle est l'une des plus imposantes du Finistère. Et quel étrange clocher !
Certains y verront une architecture russe et d'autres le célèbre Dark Vador !
Au fond du port, le pont qui enjambe la rivière de Pont l’Abbé et qui en fait une retenue d’eau est l’un des neuf ponts français dit habités encore sur pied. Construit au XIIe siècle, il donna son nom à la commune de Pont l’Abbé.
Construit sous le nom de Pont Christ, ce pont est parvenu jusqu’à nous quasiment dans sa configuration d’origine. Il permet à la fois la circulation et l’habitation.
Au XIIe siècle, selon la légende les abbés de Loctudy et les seigneurs de Pont Labbé décidèrent de construire un pont à l’emplacement du pont actuel. La cité prit alors son nom actuel. Construit comme un barrage, ce pont contribua au développement du commerce et des divers pèlerinages de la région. Il permettait aussi une meilleure circulation dans les quartiers de la ville de part et d’autre du ria.
Dès le départ le pont exploite la force hydraulique grâce à deux moulins à marée, l’un dépendant des abbés et l’autre du seigneur du château.
Au XIXe siècle, une grande minoterie s’installera sur le pont qui sera remplacée en 1936 par l’entreprise de broderie Minor. Aujourd’hui, les bâtiments ont été réhabilités en logements et en commerces.
Nous passons sous le Quai de Pors Moro ...
...et avons tout juste l'espace pour passer nos kayaks vers l'étang au-delà du pont habité.
Ce moment est rare :
en effet, à cet endroit il y a un seuil. Si le niveau d'eau est trop bas, le kayak ne passe pas, si le niveau d'eau est trop haut, nous ne pouvons pas passer nos corps sous la poutre.
Sans compter qu'il faut gérer le courant.
Nous voici donc sur l'eau devant la salle de spectacle "le Triskell"....
... et devant le château des Barons du Pont qui abrite désormais l’hôtel de ville et un musée d’art et de tradition populaire : le Musée Bigouden.
Nous décidons de ne pas repasser par le même chemin.
Nous nous engageons dans un passage sous le pont habité.
Le passage est d'abord très étroit.
Inutile d'utiliser la pagaie, il n'y a pas de place, elle reste sur le pont du kayak.
Nous avons le courant dans le bon sens.
Au coeur et sous ce pont habité, le passage s'élargit et nous passons sous des arches ...
Devant, la lumière qui donne accès au port ...
Une fois sorti, je fais demi-tour pour revoir le passage ...
Dans un trou au-dessus de l'arche, une tourterelle s'est réfugiée.
Les façades aux multiples fenêtres nous dominent.
Une échelle, qui doit être là depuis très longtemps, ne servira plus beaucoup !
Une deuxième arche propose un autre passage, mais qui au fond est muré.
Après ce moment inédit, nous repartons vers l'île Tudy.
Le courant nous pousse tranquillement.
Jean teste une nouvelle coiffure....ou bien passe en mode "hélicoptère"
Sur tribord, le monument « Aux bigoudens » réalisé en 1931 par le sculpteur François Bazin.
Cette oeuvre en granit et en bronze met en scène des bigoudènes aux cinq âges de la vie : la grand mère, la mère, la soeur, la jeune fille et la petite fille.
Les hommes sont absents de cette sculpture et c’est l’angoisse de l’attente, la tristesse et la résignation qui se lisent sur le visage de ces cinq femmes.
De part et d autre du bloc de granit, deux bas-reliefs de bronze illustrent des scènes de la mythologie celtique.
Nous sortons du port, et laissons les bateaux à quai ou au mouillage.
Nous retrouvons l'ancien moulin à marée.
Sur la rive gauche, les restes d'un bateau en bois.
Nous contemplons maintenant la rivière sous un autre angle.
La marée descend, laissant apparaître des champs de vase, qui par endroits se confondent avec l'eau verdâtre dans laquelle se reflètent les arbres, tel un miroir.
Nous approchons de l'Ile Tudy, un cormoran se repose sur une balise.
Nous passons la pointe de l'Ile Tudy et nous dirigeons vers le phare de la Perdrix.
Le vent ayant baissé, la mer est assez plate.
Nous revenons vers notre point de départ.
Nous débarquons.
Malgré les conditions météo annoncées défavorables, nous avons vécu une superbe balade.
C'est la magie de notre Bretagne, nous trouvons toujours des endroits pour naviguer en sécurité.
Nous avons aussi réalisé des passages que nous n'avions jusqu'à présent pas réussi à concrétiser :
le passage sur l'étang de l'ancien moulin à marée à l'entrée de Pont-l'Abbé et le passage sur l'étang au-delà du pont habité et le retour dans le tunnel étroit sous ce même pont...inoubliable !
Nous avons déjà navigué sur la rivière plusieurs fois...à chaque fois, c'est différent...les bois de pins, moulins à marée, îlots où nichent de nombreux oiseaux, paysages façonnés par les marées ... c'est la magie du kayak !
Vive le kayak !