Tour de Bretagne en kayak de mer : épilogue
Tour de Bretagne en kayak de mer : épilogue
Le bilan :
L'historique :
Nous l'avions imaginé, nous l'avons réalisé, et il est maintenant derrière nous, ce tour de Bretagne en kayak de mer.
Nous avons eu une pensée pour ceux qui l'avaient réalisé avant nous :
- En 1980, Loïck Bourdon, Loïc Logeais, Yvon Odion, Pascal Bourdon et Franco Ferrero ont effectué en 26 jours un tour de Bretagne de Pénestin au Mont-Saint-Michel.
- la randonnée du Ponant en 1991, raconté dans le numéro 114 de CKmer, de mars 1993.
- le tour réalisé en 2005 par Jean-Marc Janvier et Josée Conan “partir par l'ouest, revenir par l'est, la Bretagne est une île” ( CKmer n°110, juin 2006).
- En 2010, Romain Lucas, a réalisé son tour de Bretagne en solitaire, il nous livre son récit sur http://www.kayakistesdemer.org/viewtopic.php?f=57&t=7084.
- en Juin 2013, la Rando du Ponant 2 : http://tourbretagne.canalblog.com/
- en 2015, Laurent Demai et Kaloun P ont aussi réalisé leur Tro Breizh : http://pagayeursdulevant.blogspot.fr/2015/08/tro-enez-breizh-around-brittany-13.html
Il y en a eu d'autres, connus où moins connus, partagés ou pas.
Un historique a été réalisé par Guy Lecointre dans le bulletin CKmer de septembre 2004.
Sur notre tour, nous avons échangé avec Valérie Strullu, qui a aussi réalisé un tour de Bretagne.
Toutes ces expériences nous ont inspirés.
Je voudrais ici remercier Jean-François Delcamp, qui a été à l'origine de ce projet.
Jef nous a fait un beau récit sur son blog : www.randokayak.com.
Ce tour fut une formidable aventure maritime et humaine.
Une aventure maritime :
Nous avons parcouru 322,44 milles en 18 étapes, entre le 8 et le 27 juillet 2017.
La mauvaise météo nous a contraint à prendre 2 jours de repos les 21 et 22 juillet.
L'étape la plus longue était Fort Cigogne - Groix, 28,16 milles, que nous avons réalisée à une moyenne de 4 noeuds.
L'étape la plus courte : Ile Grande - Beg an Fry, 11,03 milles.
L'étape le plus difficile : Anse de Dinan - Pors Théolen avec un vent de face force 4 à 5 beaufort.
L'étape la plus technique : Pors Théolen - Plouhinec, avec le passage de la pointe du Van et du raz de Sein.
La vitesse maxi qu'a atteint mon kayak était de 9,4 noeuds, avec l'aide de la voile et des vagues.
Nous avons eu des conditions de navigation très variées : soleil, pluie, vent, pétole, vent de face force 4 à 5 beaufort, vent portant de force 4 à 5, houle de 3m50, etc...
Jef avait imaginé un parcours avant le départ.
Les conditions météo ont fait qu'à part la départ et l'arrivée, aucune étape n'a été réalisée comme prévu.
Chaque jour, nous avons dû nous adapter à la météo, et étudier le parcours du lendemain en fonction de la géographie, des courants et de notre condition physique.
Selon les calculs de Jef, nous avons effectué entre 240000 et 360000 coups de pagaie, suivant sa fréquence de pagayage.
C'est là que je vois l'intérêt de la pagaie groenlandaise, qui, si on maîtrise la technique, préserve les tendons. Jef en a d'ailleurs pris conscience puisqu'il m'a emprunté une pagaie groenlandaise pour finir la parcours.
Toutes ces heures passées sur l'eau m'ont fait franchir un cap sur la qualité de ma navigation et ma capacité à bien maîtriser le kayak dans toutes les conditions.
Aujourd'hui mes trajectoires sont plus fluides, et je fais moins d'appuis dans les situations délicates, en négociant plus facilement les pentes d'eau.
J'ai aussi un plus grande maîtrise de la voile dans une mer formée.
Bien sûr, tout cela est encore perfectible, mais ce tour m'a procuré un super entraînement dans toutes les conditions de mer.
Une aventure humaine :
Nous sommes 4 à avoir réalisé le tour de Cancale à Larmor-Baden :
Jean-François Delcamp
Jean-Yves Jacq
Didier Bouche
et votre serviteur (Pascal Jouneau)
Dave Adamson nous a accompagné de Cancale à Beg an Fry.
Erwan Roudaut nous a rejoint à l'île Wrach, et nous a quitté à Plouhinec.
Jean Drouglazet nous a rejoint aux Glénan, et a terminé le parcours jusqu'à Larmor-Baden.
Avant ce tour, je ne connaissais pas Dave, Didier et Erwan.
Les week-ends d'entraînement et le tour nous ont permis de devenir de bons amis, partageant une passion commune.
J'ai passé de vrais bons moments avec mes 6 compagnons.
Les conditions difficiles ont parfois mis à jour des traits de caractères que je ne connaissais pas, y compris chez des amis que je croyais connaître.
Vivre 3 semaines 24/24 dans la nature, déconnecté du monde, permet beaucoup d'échanges.
Nous nous connaissons tous mieux, et cette expérience a renforcé les liens d'amitié qui nous lient.
Les conditions parfois difficiles ont aussi renforcé la solidarité nécessaire dans un environnement parfois hostile.
Le seul bémol fut l'abandon de Dave, suite à incompatibilité et incompréhension avec l'un d'entre nous. Dommage qu'il n'ait pu être présent lors des week-ends d'entraînement, ceci aurait sans doute pu être évité.
J'ai apprécié les échanges avec Dave, et j'espère que nous pourrons naviguer à nouveau ensemble.
A part cet épisode, le groupe a merveilleusement bien fonctionné.
A cause du boulot, je n'avais pas un super entraînement avant de partir, et j'avais un doute sur ma capacité à finir.
La décision de limiter les premières étapes à 15 milles fut bénéfique.
Quelques étapes engagées m'ont quand fait apprécier la journée de repos à Plouhinec.
Sur la deuxième journée de repos j'étais un peu plus fatigué, mais c'est parce que l'on s'était couché un peu tard.
Sur la dernière partie du parcours, à partir de Plouhinec, j'ai été étonné de ma forme ascendante. Je me suis régalé avec la voile dans les surfs.
J'ai fini ce tour en très bonne forme, et mes tendinites récurrentes aux coudes et aux épaules (TMS au boulot) ont été complètement oubliées.
Ce tour fut aussi l'occasion de belles rencontres.
- Des passants sur la promenade de la plage des Rosaires qui, apprenant que nous allons dormir sur place sous un tarp entre 2 kayaks, nous proposent leur propriété, malheureusement trop loin pour nos kayaks chargés, pour s'installer.
- le responsable du bureau du port à Ploumanac'h qui nous donne accès gratuitement au local des douches. Nous y ferons aussi notre lessive.
- la patronne de la buvette de Pors Théolen, qui nous offre un terrain pour dormir et le ravitaillement en eau.
- le gérant du camping municipal de Penmarc'h, qui s'arrange pour nous mettre sur un emplacement près de la plage.
- le jeune remplaçant du gardien de l'aire de camping-cars de Lampaul-Plouarzel qui accepte de nous accueillir sur un bout de terrain pour passer la nuit.
- Armel et Agnès, avec qui nous avons partagé le bivouac sur l'île Wrac'h. Ils nous ont apporté des vivres offerts par kayakistesdemer.org.
- Elodie, qui a aussi participé à notre ravitaillement, et avec qui nous avons passé la soirée à Porspaul.
- Tous les amis du club de Plouhinec, qui nous ont réservé un superbe accueil.
- Hugues et Valérie, avec qui nous avons partagé un excellent thé.
- Guillaume, les moniteurs et les stagiaires de Fort Cigogne, avec qui nous avons vécu une expérience inoubliable.
...et puis tous ces anonymes rencontrés au fil des étapes, qui étaient curieux et admiratifs de notre aventure.
Certains ont découvert les possibilités de la rando en kayak de mer. Nous avons suscité chez beaucoup de l'envie, et certains ont pris conscience que l'aventure peut être vécue pas loin de chez soi.
J'ai une pensée pour Jacques, que nous avions rencontré lors du tour du Finistère l'année dernière, et qui aurait aimé venir à notre rencontre pendant ce tour. Malheureusement, des problèmes de santé l'ont empêché de concrétiser ce voeu, mais nous avons eu le plaisir de l'avoir au téléphone lors de l'étape à l'île Wrac'h.
Une mention spéciale à Marie-Jo qui a assuré au niveau logistique :
- transport vers Cancale pour le départ
- ravitaillement à Beg An Fry
- accueil inoubliable pendant les 2 jours de repos
- transport pour le retour en Finistère, associée à Pierre.
Un grand merci aussi à Jean-Yves, pour nous avoir accueilli chez lui.
Le repos après l'effort :
Sur ce tour, pour dormir, nous avons utilisé 2 campings : sur l'île de Batz et à Penmarc'h.
Pour le reste ce fut des bivouacs dans des endroits très divers (herbe, galets, sable, etc..), et dans des configurations différentes (tente, tarp, tipi, sursac...)
Les jours où la pluie et le vent étaient bien présents, nous avons apprécié le tipi de Jef, qui nous permettait de manger à l'abri.
Cette expérience a enrichi ma réflexion sur le futur remplacement de ma tente, qui commence à donner des signes de fatigue (infiltrations d'eau).
C'est effectivement intéressant de pouvoir se changer et manger à l'abri. Une tente avec une grande abside sera sans doute mon prochain choix.
L'organisation :
Nous avions tous une expérience de la rando en kayak, mais c'est la première fois que nous partions aussi longtemps.
Ceci a nécessité une bonne organisation pour vivre au maximum en autonomie.
Je rapporterai mes progrès dans ce domaine dans un prochain article.
Ce tour fut très formateur aussi sur ce sujet.
C'est fini...jusqu'à la prochaine fois...
Voilà pour mon bilan.
Un grand merci à mes compagnons de route, sans qui cette aventure n'aurait pas eu lieu comme elle a été vécue.
Merci Jef, Didier, Jean-Yves, Dave, Erwan et Jean.
Amitié, solidarité, convivialité, bonne humeur, bienveillance, respect, autant de valeurs que nous avons mis en oeuvre sur ces trois semaines.
Nous avons appris sur les autres, et sur nous-même.
Ce tour restera pour moi un souvenir inoubliable.
Il nous aura aussi permis de découvrir des sites magnifiques, la côte bretonne bien sûr, mais aussi les îles (Hébihens, île de la Comtesse, île d'Er, Milliau, Morbic, Batz, Wrac'h, île d'Yoch, Glénan, Groix, île de Rohellan, etc...), mais aussi la pointe d'Erquy, le cap Frehel et ses grottes ou le vallon de Trobodec.
La Bretagne est si belle, quel que soit le temps.
Vive le kayak !